Interview de Catherine Gaudy et Philippe Santana - 15/01/2013
Catherine Gaudy |
Philippe Santana |
Directrice générale des ressources humaines du ministère de l'Éducation nationale et du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche |
Chef de service, adjoint à la DGRH |
1- Les ministres ont annoncé 54 000 recrutements dans les deux ans à venir dont 43 000 enseignants (22 000 en 2013). Quels sont les autres postes à pourvoir et quelle est la répartition ?
Catherine Gaudy : Pour les deux prochaines années, les volumes de recrutement permettront le remplacement des départs à la retraite et le rétablissement d'une formation des enseignants exigeante et de haut niveau.
Ce sont 43 500 professeurs qui seront recrutés en deux vagues d'un volume équivalent ; les premiers ont passé les épreuves d’admissibilité à l’automne dernier et seront affectés, en tant que stagiaires, à la rentrée 2013. Les seconds s’inscriront aux concours dès le 15 janvier prochain pour passer les épreuves écrites d’admissibilité en juin 2013. Ils prendront leurs fonctions à part entière à la rentrée 2014.
2- Les baisses d'inscriptions au concours ne concernent pas toutes les disciplines. Sur ce sujet, les ministres n'ont pas abordé la difficulté de faire naître des vocations dans les matières scientifiques, notamment les mathématiques.
Catherine Gaudy : Des difficultés de recrutement existent, mais elles sont concentrées sur certaines disciplines du second degré, telles que les mathématiques où l’on décèle une désaffection des jeunes pour les études scientifiques et sans doute une concurrence avec le secteur privé, et également l'anglais et les lettres classiques.
Ces difficultés sont liées à un manque de formation dû aux reformes menées ces dernières années, ainsi qu’à une succession de sessions dont les volumes de recrutement sont restés durablement peu élevés. Le signe fort donné par le ministre de l’Éducation nationale sur les mesures de création d’emplois et sur les nouvelles modalités de la formation qui se déroulera à la fois à l’université, au sein des écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE) et en alternance devant les élèves, est de nature à susciter les vocations et à augmenter le vivier de candidats.
3- A la rentrée 2013, chaque académie aura son Ecole supérieure du professorat et de l'éducation. Quelle sera la mission de ces ESPE ? Quelle différence avec les IUFM et les masters actuels ? Quid de la réforme pour ceux qui sont en formation cette année ?
Philippe Santana : Les ESPE qui ouvriront leurs portes à la rentrée 2013 seront les fers de lance de la refondation pédagogique. Situées au cœur d’un faisceau constitué des UFR et des différentes écoles internes pour chaque site académique, leur mission première sera de former les enseignants. Les enseignements dispensés en leur sein auront une double vocation disciplinaire et professionnelle et s’articuleront autour de 4 composantes principales : des enseignements scientifiques et disciplinaires, un tronc commun consacrés aux acquis méthodologiques, une spécialisation en fonction du métier choisi par l’étudiant et enfin, une pratique professionnelle, surtout en M2, les stages s’effectuant en école primaire ou en établissement scolaire.
Les ESPE ne seront pas réservées aux candidats aux concours de l’enseignement. Elles formeront aussi aux autres métiers de l’éducation et de la formation.
Seront également concernés, les étudiants en milieu et fin de licence bénéficiant d’un emploi d’avenir professeur, ou encore, tous ceux qui souhaitent développer des compétences dans le domaine des métiers de l’éducation et la formation.
Les étudiants qui passeront les concours 2014 s’inscriront en Master 1 '' métiers de l’éducation et de la formation » (MEEF) dès la prochaine rentrée universitaire, et suivront des modules d’enseignement du tronc commun et de spécialisation dispensées par ces écoles.
4- Vincent Peillon a évoqué la rémunération des élèves-enseignants ? c'est-à-dire ? Comment ? Pour qui exactement ?
Philippe Santana : La nouvelle formation initiale mise en place sera rémunérée à l’issue du concours sous statut de fonctionnaire stagiaire effectuant à temps partiel devant élèves dans le cadre de leur cursus Master 2 MEEF, car il n’est pas acceptable que des jeunes souhaitant devenir enseignant renoncent à leur projet professionnel, faute de pouvoir payer leurs études.
Un dispositif spécifique est d’autre part prévu pour les étudiants les plus modestes, auxquels seront proposés des emplois d’avenir professeur qui se mettent actuellement en place avec les 4 000 premiers recrutements et qui concerneront d’ici 2015, 18 000 jeunes boursiers se destinant aux métiers de l’enseignement. Selon le niveau de leur bourse sur critères sociaux, ils percevront un revenu mensuel compris entre 617 et 1086 euros.
5 - Le ministre a également parlé d'une revalorisation nécessaire des "conditions matérielles du métier d'enseignant". Dans le contexte actuel, que signifie exactement cette expression, dans quelles conditions et dans quelle mesure ?
Catherine Gaudy : Le ministre s’est dit prêt à entrer dans une discussion sur l’évolution du métier d’enseignant.
Il faut effectivement revaloriser l'image du métier qui a changé et ses évolutions doivent pouvoir être inscrites dans les textes. Les suppressions d'emplois des années précédentes ont pu donner l'impression que les enseignants n'étaient peut-être pas si utiles que cela, alors que leur rôle dans la formation de la jeunesse est essentiel.