Témoignage du Dr Laurent Vignalou, médecin coordonnateur national auprès des ministères économique et financier - 05/07/2010
Le récent accord "santé et sécurité au travail" vous semble-t-il présenter des avancées importantes pour la médecine de prévention?
Dr Laurent Vignalou : Oui, sur plusieurs points : le fait que, dans les CHSCT, les médecins de prévention peuvent être conseillers dans les domaines de l'organisation du travail ; la promotion et l'harmonisation de véritables services de santé au travail dans les trois fonctions publiques ; la possibilité de rendre plus attractif le recrutement des médecins de prévention (règles des cumuls, contrats, positionnement). J'ajouterais que l'accord va permettre aussi une meilleure connaissance des risques professionnels (troubles musculo-squelettiques, amiante...) en renforçant les moyens et les instances de prévention.
- Quels dispositifs faudra-t-il à votre sens envisager concrètement pour sa mise en oeuvre?
Concrètement, comme l'accord mobilise les trois fonctions publiques, je pense qu'il faudra rapidement mettre en place les groupes de travail et de suivi prévus. Surtout, les représentants des personnels doivent être associés concrètement à ces groupes de travail et ne pas seulement être considérés comme de seuls auteurs de propositions. Par ailleurs, je pense que la prise en compte des risques psycho-sociaux et leurs conséquences humaines et économiques devraient relever de plans spécifiques, comme le ministre du Travail le prescrit dans le secteur privé.
- Comment voyez-vous évoluer d'une manière générale le rôle de la médecine de prévention dans une période de "crise"?
L'évolution de la médecine en période de crise doit entraîner un recentrage des médecins sur la prévention de terrain et affirmer leur place dans des instances aux prérogatives renouvelées. Certaines de ses missions peuvent en effet être confiées à des acteurs préventeurs, dans le cadre de l'action pluridisciplinaire, dans la mesure où cette dernière s'articule autour du médecin de prévention et ce, sous la responsabilité du chef de service. Si la perspective d'une baisse de la "démographie médicale" en médecine de prévention devait se confirmer, cette redistribution des missions deviendra obligatoire.
La pluridisciplinarité restera professionnelle si elle se réalise autour des médecins, car les aspect cliniques de l'exercice médical deviendront prépondérants dans les domaines complexes de la souffrance au travail notamment. La formation et la spécialisation des médecins à la médecine du travail deviennent une urgence et devraient inciter à reprendre les équivalences mises en place dans ce domaine dans les années précédentes. D'ailleurs Xavier Darcos vient de confier une mission au Conseil économique et social en ce sens.